Et la lumière fut !

Un jour, mon grand oncle photographe, Claude Fromenti, m’a offert ce parfum en me disant : « Tiens, puisque tu veux être photographe, amuse-toi avec ça. » Il s’agissait du célèbre flacon d’une fragrance légendaire : Arpège. Ce parfum avait été nommé ainsi, par Jeanne Lanvin, en l’honneur de sa fille musicienne.

Son graphisme monochrome doré, dessiné par Paul Iribe, représente de façon stylisée (Art déco) une mère et son enfant sur un flacon en forme de boule noire. Une boule noire … Un dessin doré. Quel que soit l’élément placé dans son environnement, pour peu qu’il soit légèrement éclairé, l’on observe son reflet à la surface du flacon. Un bon début d’entrée en matière, un vrai casse tête pour moi qui était novice. Les photographes comprendront le défi. A cette époque, je suivais une formation aux Gobelins pour apprendre les secrets de la photographie à la chambre. Les chambres les plus couramment utilisées à l’époque étaient soit des Linhof qui pouvaient être utilisées en reportage soit des Sinar, d’avantage utilisées en studio. J’y reviendrai plus tard.

Un parfum de mise en scène

J’avais donc apporté tout un tas d’accessoires pour mettre en scène ce flacon : des gants, une paire de jumelle de théâtre, un tissus de soie noire. Ce parfum, qualifié d’une « impeccable modernité » par Colette, avait pris avec ma mise en scène, un sacré coup de vieux ! C’était sans compter aussi sur le fait que les reflets des objets ( que j’avais choisis de couleur foncée pour qu’ils ne prennent tout de même pas le dessus par rapport au flacon ), se retrouvaient forcément à la surface du flacon et venaient parasiter la pureté de ses lignes. Je ne vous montrerai pas la photo réalisée à l’époque. Elle est l’exemple à ne pas suivre.

Toujours est-il que cet exercice, en dehors de la manipulation d’une chambre photographique, m’a fait comprendre beaucoup de choses sur l’importance de la lumière, sa qualité, sa taille, son placement, sa température couleur, la distance à laquelle elle est placée par rapport à l’objet. J’avais, comme vous pouvez le voir, encore beaucoup de choses à apprendre : comment façonner un objet, un visage, grâce à la lumière.

Ecrire avec la lumière

Elle est bien sûr le sujet essentiel pour un photographe. Lumière du jour ou lumière artificielle ( il en existe une telle variété ), il s’agit de bien la choisir en fonction de ses intentions, en fonction du sujet photographié, en fonction aussi de la mode, de l’air du temps. Photographier, comme son nom l’indique, c’est écrire avec la lumière. Bien sûr, j’aborderai ce chapitre bien plus précisément, comme il le mérite.

Bien plus tard, j’ai photographié avec beaucoup de joie, bien des parfums pour la presse féminine lifestyle, pour le magazine ELLE, principalement. La photo du flacon Arpège, en exergue de cet article, a été réalisée en lumière du jour avec mon iPhone. Elle est sans prétention. J’ai tout simplement eu l’envie de la publier un jour, sur Instagram, en souvenir de mon grand oncle qui m’a mis le pied à l’étrier, et de mon apprentissage. Elle illustre simplement qu’il est bon d’aller vers l’essentiel, de ne pas s’encombrer de détails inutiles qui ne peuvent que desservir le sujet principal.

A bientôt pour d’autres anecdotes.